Page:Kempis - L Imitation de Jesus Christ, traduction Lammenais, edition Pages, 1890.djvu/79

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Nul en ce moment, fût-il roi ou pape, n’est exempt d’angoisses et de tribulations.

Qui donc a le meilleur sort ? Celui, certes, qui sait souffrir quelque chose pour Dieu.

2. Dans leur faiblesse et leur peu de lumières, plusieurs disent : Que cet homme a une heureuse vie ! qu’il est riche, grand, puissant, élevé !

Mais considérez les biens du ciel, et vous verrez que tous ces biens du temps ne sont rien ; que, toujours très incertains, ils sont plutôt un poids qui fatigue, parce qu’on ne les possède jamais sans défiance et sans crainte.

Avoir en abondance les biens du temps, ce n’est pas là le bonheur de l’homme : la médiocrité lui suffit.

C’est vraiment une grande misère de vivre sur la terre.

Plus un homme veut avancer dans les voies spirituelles, plus la vie présente lui devient amère, parce qu’il sent mieux et voit plus clairement l’infirmité de la nature humaine et sa corruption.

Manger, boire, veiller, dormir, se reposer, travailler, être assujetti à toutes les nécessités de la nature, c’est vraiment une grande misère et une grande affliction pour l’homme pieux qui voudrait être dégagé de ses liens terrestres, et délivré de tout péché.

3. Car l’homme intérieur est, en ce monde, étrangement appesanti par les nécessités du corps.

Et c’est pourquoi le Prophète demandait, avec d’ardentes prières, d’en être affranchi, disant : Seigneur, délivrez-moi de mes nécessités[1].

Malheur donc à ceux qui ne connaissent point leur misère ! et malheur encore plus à ceux qui aiment cette misère et cette vie périssable !

Car il y en a qui l’embrassent si avidement, qu’ayant à peine le nécessaire en travaillant ou en mendiant, ils n’é-

  1. Ps. xxiv, 17.