Page:Kerigant - Les Chouans - Épisodes des guerres de l’Ouest dans les Côtes-du-Nord, 1882.djvu/152

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Le premier Bonaparte, en exécutant le 18 brumaire, rendit un service si éminent à la France, qu’elle en ressentit une reconnaissance poussée jusqu’au fétichisme. Cet homme, d’un génie incontestable, devint pour elle, pendant un certain temps, une sorte de dieu ; il fut dès lors fasciné par sa destinée extraordinaire et n’écouta plus que son orgueil et son ambition sans limites ; il se considéra lui-même comme un être olympien ; le reste lui parut un vil troupeau, bon seulement pour servir à l’accroissement de sa fortune.

Je viens de dire comment et par quels motifs Bonaparte s’était attiré la haine de tous les chefs royalistes qui n’avaient pas voulu faire cause commune avec lui, c’est-à-dire, se mettre au nombre de ses esclaves. Cette persécution dura pendant tout le temps de l’Empire et fit naître chez les persécutés une implacable idée de vengeance, elle suscita parmi eux des pensées sinistres, d’une violence absolument étrangère à leurs mœurs, à tous leurs sentiments, ce dont ils s’étaient préservés même au milieu de la guerre civile.

Ayant assez vécu pour contrôler les faits, je puis

    le sentiment chrétien inoculé dans les âmes ; mais, en le détruisant, ils effacent toutes les garanties, ils ouvrent la porte à toutes les passions sauvages. Alors, gare à la peine du talion ! ce sera le temps du nihilisme.