Page:Kipling - Au hasard de la vie, trad. Varlet, 1928.djvu/264

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— Eh bien quoi, lui aussi avait bonne réputation ; ainsi donc tout va bien. Mulcahy doit avoir prévu sa ligne de retraite, sans quoi il ne se serait pas tellement avancé à parler puissances des ténèbres.

— Avez-vous su quelque chose du conseil de guerre de régiment qu’il y a eu chez les Boneens Noirs ces jours-ci ? Une demi-compagnie d’entre eux qui a pris un bleu de la nouvelle classe et l’a pendu par les bras avec une corde de tente à une véranda de troisième étage. Ils n’ont pas donné la raison pourquoi ils avaient fait cela, mais le bleu était à moitié mort. Je pense que les Boneens ont la vue courte. C’était un ami de Mulcahy ou un homme du même trafic. Ils auraient beaucoup mieux fait d’accepter sa bière, répliqua Dan judicieusement.

— Ils auraient bien mieux fait encore de le livrer au colon, dit Horse Egan, à moins… mais pour sûr que la nouvelle s’en serait répandue par tout le pays et aurait valu au régiment un mauvais renom.

— Et il n’y aurait pas de récompense pour cet homme… lui qui n’a fait que bavarder, dit l’homme du Kerry ingénument.

— Tu parles selon ta race, dit Dan avec un rire. Il n’y a jamais eu encore un homme du Kerry qui ne vendrait pas son frère pour recevoir d’un agent de police une pipée de tabac et une tape sur le dos.

— Dieu soit loué, je ne suis pas un fichu Orangiste, répliqua l’autre.

— Non, et tu ne le seras jamais, reprit Dan. C’est une race de vrais hommes dans l’Ulster. Aimerais-tu en essayer avec moi ?