Page:Kipling - Au hasard de la vie, trad. Varlet, 1928.djvu/270

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— Par la Mère de tous les saints au ciel et par tous les diables en enfer, où est mon beau soulier neuf qui a perdu son talon ? hurla Horse Egan en bouleversant le paquetage de chacun sauf le sien. Il était en train de combler les lacunes de son fourniment nécessité par une campagne, et dans pareille besogne celui-là vole le mieux qui vole le dernier. Ah ! Mulcahy, lança-t-il, tu arrives à temps. Nous avons reçu notre ordre de route, et nous partons jeudi pour aller faire un pique-nique avec les Lanciers d’à côté.

Un ambulancier de service parut, chargé d’une grande manne pleine de rouleaux de bandes de pansement, offertes par la prévoyance de la Reine à ceux qui pourraient en avoir besoin par la suite. Horse Egan déroula son bandage et le fit claquer sous le nez de Mulcahy, en chantant :

Peau de mouton et cire d’abeilles, tonnerre, poix et plâtre.
Plus tu essaieras de l’enlever, plus ferme il tiendra.
Comme je partais pour la Nouvelle-Orléans…

— Tu connais la suite, mon gars de Juif irlandais-américain. Parbleu ; tu vas devoir te battre pour la Reine d’ici une quinzaine, mon mignon.

Un tonnerre de rires l’interrompit. Mulcahy promena par la chambre des yeux égarés. Conseillez si vous voulez à un petit garçon de braver son père quand la voiture qui doit le mener au cirque est à la porte ; ou à une jeune fille de faire une de ses