Page:Kipling - Le Livre de la jungle, illustré par de Becque.djvu/45

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Alors, plus de la moitié du Clan hurla :

— Un homme ! Un homme ! Qu’est-ce qu’un homme peut avoir à faire avec nous ? Qu’il s’en aille avec ses pareils !

— C’est cela ! Pour tourner contre nous tout le peuple des villages ? vociféra Shere Khan. Non, non, donnez-le moi. C’est un homme, et nul de nous ne peut le fixer dans les yeux.

Akela dressa de nouveau la tête, et dit :

— Il a partagé notre curée. Il a dormi avec nous. Il a rabattu le gibier pour nous. Il n’a pas enfreint un seul mot de la Loi de la Jungle !

— Et moi, je l’ai payé le prix d’un taureau, lorsqu’il fut accepté : un taureau, c’est peu de chose ; mais l’honneur de Bagheera vaut peut-être une bataille ! dit Bagheera de sa voix la plus onctueuse.

— Un taureau payé voilà dix ans ! grogna l’assemblée. Que nous importent des os qui ont dix ans !

— Et un serment ? fit Bagheera en relevant sa lèvre sur ses dents blanches. Ah ! on fait bien de vous nommer le Peuple Libre !

— Nul petit d’homme ne doit courir avec le Peuple de la Jungle ! rugit Shere Khan. Donnez-le-moi !

— Il est notre frère en tout, sauf par le sang, poursuivit Akela ; et vous le tueriez ici ! — En vérité, j’ai vécu trop longtemps. Quelques-uns d’entre vous sont des mangeurs de bétail, et j’ai entendu dire que d’autres, suivant les leçons de Shere Khan, vont par la nuit noire enlever des enfants aux seuils des villageois. Donc je sais que vous êtes