Page:Kipling - Le Livre de la jungle, illustré par de Becque.djvu/48

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Il donna un coup de pied dans le feu, et les étincelles volèrent.

— Il n’y aura point de guerre entre aucun de nous dans le Clan. Mais il y a une dette qu’il me faut payer avant de partir.

Il marcha à grands pas vers l’endroit où Shere Khan couché clignait de l’œil stupidement aux flammes, et le prit par la touffe de poils sous le menton. Bagheera suivait, en cas d’accident.

— Debout, chien ! cria Mowgli. Debout quand un homme parle, ou je mets le feu à ta robe !

Les oreilles de Shere Khan s’aplatirent sur sa tête, et il ferma les yeux, car la branche flamboyante était tout près de lui.

— Cet égorgeur de bétail a dit qu’il me tuerait en plein Conseil, parce qu’il ne m’avait pas tué quand j’étais petit. Voici — et voilà — comment nous, les hommes, nous battons les chiens. Remue seulement une moustache, Lungri, et je t’enfonce la Fleur Rouge dans la gorge !

Il frappa Shere Khan de sa branche sur la tête, tandis que le tigre geignait et pleurnichait en une agonie d’épouvante.

— Peuh ! chat de jungle roussi — va-t’en, maintenant, mais souviens-toi de mes paroles : la première fois que je reviendrai au Rocher du Conseil, comme il sied que vienne un homme, ce sera coiffé de la peau de Shere Khan. Quant au reste, Akela est libre de vivre comme il lui plaît. Vous ne le tuerez pas, parce que je le défends. J’ai idée, d’ailleurs, que vous n’allez pas rester ici plus