Page:Kipling - Trois Troupiers et autres histoires, trad. Varlet, 1926.djvu/21

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vaney revient à sa première manière, et pour l’apaiser il reconnaît que Rip serait beaucoup mieux là-bas dans la montagne que dans la plaine du Bengale, et que c’est malheureux qu’il ne puisse aller là où il serait tellement dorloté. Et il continue ainsi, soutenant la bourgeoise, la bourrant et la travaillant tant et si bien qu’elle se persuade que la vie n’aurait plus de prix pour elle si elle n’avait pas le chien. Puis tout à coup il lui dit :

— Mais vous allez l’avoir, madame, car j’ai le cœur sensible, et je ne suis pas un flegmatique comme ce type du Yorkshire ; mais cela vous coûtera trois cents roupies[1], pas un sou de moins.

— Ne le croyez pas, madame, que je dis ; la dame du colonel n’accepterait pas de le donner pour cinq cents.

— Qui t’a dit qu’elle accepterait ? que dit Mulvaney ; il n’est pas question de le lui acheter, mais pour faire plaisir à cette bonne et excellente dame-ci, je ferai ce que je n’ai jamais songé à faire de ma vie : je le volerai !

— Ne dites pas voler, que dit Mme  de Souza ; il sera très heureux chez moi. Il arrive souvent que des chiens se perdent, vous le savez, et alors ils s’égarent, et celui-ci m’aime et je l’aime comme je

  1. Une roupie contient seize annas, et vaut (au pair) 2 fr. 25.