Page:Kotzebue - Supplement au theatre choisi.djvu/208

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fut d’en écarter soigneusement le vice et d’y faire germer la vertu ; et dans ce soin, cette application soutenue, elle se réjouissait à l’idée qu’un jour cet objet de sa tendre sollicitude, aujourd’hui méconnu, rejeté, pourrait devenir la joie et l’honneur de son père. Mais hélas ! son attachement au monde et à ses plaisirs, rendent son âme inaccessible aux doux sentimens de la nature ; et sa conscience, étouffée sous le poids des grandeurs, ne laisse plus entendre sa voix.

Le Baron, à part.

Quel trouble a passé dans mon âme ! Chaque mot qu’il prononce… Continuez, jeune homme… continuez.

Frédéric.

Ma jeunesse ne fut pas plus fortunée que mon enfance. Le sentiment d’une noble ambition, qui germait dans mon âme, me donna de bonne heure l’amour du travail et de l’indépendance. Pour n’être plus à charge à ma mère, pour la soulager dans sa misère, je me fis soldat ; et malgré la rigueur de ce métier, je ne me trouvai point malheureux : tant il est vrai que la Providence, toujours sage dans ses dispositions, donne au jeune homme, dont les forces ne sont point suffisantes encore pour supporter le fardeau du malheur, la légèreté et la gaîté pour compagnes ; tandis qu’elle réserve à l’homme mûr et réfléchi les soucis et les craintes. Une conduite exempte de reproches, l’amour du bien, le charme d’une