Page:Krafft-Ebing - Psychopathia Sexualis, Carré, 1895.djvu/322

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

par peur des suites que pourraient avoir des rapports avec un homme.

À l’âge de vingt-sept ans, elle conclut un second mariage avec un homme maladif et pour lequel elle n’avait pas d’affection. La malade a accouché trois fois, a rempli ses devoirs maternels ; elle dépérit au physique et éprouva dans les dernières années de sa vie matrimoniale un déplaisir croissant à faire le coït, bien qu’il y eût toujours en elle un violent désir de satisfaction sexuelle. Le déplaisir à faire le coït a été en partie occasionné par l’idée de la maladie de son mari.

Trois ans après la mort de son second mari, la malade découvrit que sa fille du premier mariage, âgée de neuf ans, se livrait à la masturbation et en dépérissait. Elle consulta le Dictionnaire Encyclopédique sur ce vice, ne put résister à l’impulsion de l’essayer et devint elle aussi onaniste. Elle ne peut se décider à faire une confession complète sur cette période de sa vie. Elle affirme avoir été en proie à une terrible excitation sexuelle et avoir placé hors de la maison ses deux filles pour les préserver d’« un sort terrible », tandis qu’elle ne voyait aucun inconvénient à garder avec elle ses deux garçons.

La malade devint neurasthénique ex masturbatione[ws 1] (irritation spinale, congestion à la tête, faiblesse, embarras intellectuel, etc.), parfois même dysthymique avec un tædium vitæ très pénible.

Son sens sexuel la poussait tantôt vers la femme, tantôt vers l’homme. Elle savait se dompter, souffrait beaucoup de son abstinence, d’autant plus que, à cause de ses malaises neurasthéniques, elle n’essayait de se soulager par la masturbation que dans les cas extrêmes. À l’heure qu’il est, cette femme, qui a déjà quarante-quatre ans, mais qui a encore ses menstruations régulièrement, souffre beaucoup de la passion qu’elle a conçue pour un jeune homme dont elle ne peut pas éviter le voisinage pour des raisons professionnelles.

La malade, dans son extérieur, ne présente rien d’extraordinaire : elle est gracieusement bâtie, d’une musculature faible. Le bassin est tout à fait féminin, mais les bras et les jambes sont étonnamment grands et d’une conformation masculine très prononcée. Comme aucune chaussure féminine ne va à son pied et qu’elle ne veut pas pourtant se faire remarquer, elle serre ses pieds dans des bottines de femme, de sorte qu’ils en ont été déformés. Les parties génitales sont développées d’une façon tout à fait normale, et sans changements, sauf un descensus uteri[ws 2] avec

  1. à cause de la masturbation
  2. descente d’organes