Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/157

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Même situation en Italie. Dans mainte province l’agriculteur est complètement ruiné. Réduit à la misère par l’État, le petit propriétaire paysan ne paie plus les impôts de l’État saisit impitoyablement le lopin de terre du cultivateur. Dans le courant d’une seule année, 6.644 petites propriétés, de la valeur moyenne de 99 francs ont été saisies. Quoi d’étonnant si dans ces provinces la révolte s’installe en permanence ! Tantôt c’est un fanatique prêchant le communisme religieux, qui entraîne après lui des milliers de paysans, et ces sectaires ne se dispersent que sous les balles des soldats ; tantôt c’est un village qui vient en masse s’emparer des terres incultes de tel seigneur et les met en culture pour son compte ; tantôt enfin ce sont des bandes de villageois affamés qui se présentent devant la maison commune et demandent, sous menace de révolte, du pain et du travail.

Qu’on ne nous dise pas que ces faits sont isolés ! Les révoltes des paysans français jusqu’en mai 1789 étaient-elles plus fréquentes ? Moins nombreuses et moins conscientes au début, n’ont-elles pas été le canevas, le fond sur lequel a surgi plus tard la révolution des grandes villes !




Enfin, à l’extrémité orientale de l’Europe, en Russie, la question agraire se présente sous un aspect qui, à bien des égards, nous rappelle la situation de la France avant 1789. Le servage personnel y est aboli et chaque commune agricole se trouve en possession de terres ; mais elles sont pour la plupart si mauvaises ou en quantité si insuffisante, le