Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/194

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nera les masses sur le terrain économique — un quatrième État composé de bourgeois privilégiés, et alors, gare aux masses ! — Le gouvernement représentatif, élu par cette minorité, agira en conséquence. Il légiférera pour maintenir ses privilèges et il procédera contre les insoumis par la force et le massacre.




Il nous serait impossible d’analyser ici tous les vices du gouvernement représentatif. Ce seraient des volumes à faire. En nous bornant seulement aux plus essentiels, nous sortirions encore des cadres de ces chapitres. Il y en a un, pourtant, qui mérite d’être mentionné.

Chose étrange ! Le gouvernement représentatif avait pour but d’empêcher le gouvernement personnel ; il devait remettre le pouvoir aux mains d’une classe, et non d’une personne. Et cependant il a toujours eu pour tendance de revenir au gouvernement personnel, de se soumettre à un seul homme.

La cause de cette anomalie est bien simple. En effet, après avoir armé le gouvernement de mille et mille attributions qu’on lui reconnaît aujourd’hui ; après lui avoir confié la gestion, en bloc, de toutes les affaires qui intéressent le pays, et donné un budget de quelques milliards, était-il possible de confier à la cohue parlementaire la gérance de ces innombrables affaires ? Il fallut donc nommer un pouvoir exécutif — le ministère — qui fût investi de toutes ces attributions, presque royales. Quelle misérable autorité, en effet, que celle d’un Louis XIV, qui se vante d’être l’État, en comparaison de celle d’un ministère constitutionnel de nos jours !