Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/79

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humide, où cinq, six êtres humains grouillent dans l’espace de quelques mètres carrés ; où votre mère, fatiguée par la vie, plus vieillie par les soucis que par l’âge, vous offre pour toute nourriture du pain, des pommes de terre et un liquide noirâtre qualifié ironiquement de café ; où, pour toute distraction, vous avez toujours la même question à l’ordre du jour, celle de savoir comment vous paierez demain le boulanger et après-demain le propriétaire !

— Eh quoi ! vous faudra-t-il traîner la même existence misérable que votre père et votre mère ont traînée pendant trente, quarante ans ! Travailler toute la vie pour procurer à quelques-uns toutes les jouissances du bien-être, du savoir, de l’art, et garder pour soi le souci continuel du morceau de pain ? Renoncer à jamais à tout ce qui rend la vie si belle, pour se vouer à procurer tous les avantages à une poignée d’oisifs ? s’user au travail, et ne connaître que la gêne, si ce n’est la misère, lorsque le chômage arrivera ? Est-ce cela que vous convoitez dans la vie ?




Peut-être vous résignerez-vous. N’entrevoyant pas d’issue à la situation, il se peut que vous vous disiez : « Des générations entières ont subi le même sort, et moi, qui ne puis rien y changer, je dois le subir aussi ! Donc, travaillons, et tâchons de vivre de notre mieux. »

Soit ! Mais alors la vie elle-même se chargera de vous éclairer.

Un jour, viendra la crise, une de ces crises, non