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les communes villageoises des barbares. Il est vrai qu’il y a peu de témoignages directs sur ce point, et dans la littérature de l’antiquité nous n’avons que les passages de Diodore et de Jules César relatifs aux habitants des îles Lipari (une tribu des Celtibères) et aux Suèves. Mais nous ne manquons pas de témoignages indirects pour prouver que l’agriculture en commun était pratiquée par certaines tribus de Teutons, de Francs et par celles des anciens Écossais, des Irlandais et des Welches[1]. Quant aux survivances de cette habitude, elles sont presque innombrables. Même dans la France, complètement romanisée, la culture en commun était encore habituelle, il y a environ vingt-cinq ans, en Bretagne, dans le Morbihan[2]. L’ancien cyvar Welche, ou association de laboureurs, ainsi que la culture en commun de la terre attribuée au temple du village sont tout à fait ordinaires parmi les tribus du Caucase les moins touchées par la civilisation[3]. Des faits semblables se rencontrent constamment parmi les paysans russes. On sait de plus que plusieurs tribus du Brésil, de l’Amérique centrale et du Mexique avaient l’habitude de cultiver leurs champs en commun et que cette même habitude est très répandue chez les Malais, dans la Nouvelle-Calédonie, parmi plusieurs races nègres et chez d’autres peuples[4]. Bref, l’agriculture en commun est si habi-

  1. Maurer, Markgenossenschaft ; Lamprecht, Wirtschaft und Recht der Franken zur Zeit der Volksrechte dans Historisches Taschenbuch, 1883 ; Seebohm, The English Village Community, chap. VI, VII et IX.
  2. Letourneau, dans le Bulletin de la Société d’Anthropologie, 1888, vol. XI, p. 476.
  3. Walter, Das alte Wallis, p. 323 ; Dm. Bakradze et M. Khoudadoff (en russe), Zapiski de la Société géographique du Caucase, tome XIV. Partie I.
  4. Bancroft, Native Races ; Waitz, Anthropologie, III, 423 ; Montrosier, dans le Bulletin de la Société d’Anthropologie, 1870 ; Post, Studien, etc.