Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/135

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selon sa conception personnelle, d’élire ses propres pasteurs, — bref, le droit de l’individu au développement intellectuel et religieux qui lui conviendra. C’est encore le droit d’autonomie de chaque paroisse et, par conséquent, de l’agglomération urbaine. Mais les paysans anglais ne se soulevèrent pas aussi généralement que ce fut fait en France, pour abolir les redevances féodales et les dîmes, ou pour reprendre les terres communales ; et si les bandes de Cromwell démolirent un certain nombre de châteaux qui représentaient de vraies forteresses de la féodalité, ces bandes ne s’attaquèrent malheureusement ni aux prétentions féodales des seigneurs sur la terre, ni même au droit de justice féodale que les seigneurs exerçaient sur leurs vassaux. C’est ce qui fait que la Révolution anglaise, alors qu’elle conquit des droits précieux pour l’individu, ne détruisit pas le pouvoir féodal du seigneur : elle ne fit que le modifier, tout en lui conservant ses droits sur les terres — droits qui persistent jusqu’à nos jours.

La Révolution anglaise constitua sans doute le pouvoir politique de la bourgeoisie ; mais ce pouvoir ne fut obtenu qu’en le partageant avec l’aristocratie foncière. Et si la Révolution donna à la bourgeoisie anglaise une ère de prospérité pour son commerce et son industrie, cette prospérité fut obtenue à la condition que la bourgeoisie qui en profiterait ne s’attaquerait pas aux privilèges fonciers des nobles. Au contraire, elle aida ceux-ci à les accroître, du moins en valeur. Elle aida les seigneurs à s’emparer légalement des terres communales au moyen du bornage (les Enclosure Acts), ce qui réduisit la population agricole à la misère, la mit à la merci du