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tout dans l’est, le nord-est et le sud-est de la France.

Les documents précis sur ce soulèvement nous manquent. Ceux qu’on a publiés sont très incomplets, et la plupart portent la trace de l’esprit de parti. Si l’on s’adresse au Moniteur, qui, on le sait, n’a commencé à paraître que le 24 novembre 1789, et dont les 93 numéros, du 8 mai au 23 novembre 1789, ont été fabriqués après coup en l’an IV[1], on y trouve une tendance à démontrer que tout le mouvement fut l’œuvre des ennemis de la Révolution : des gens sans cœur, qui profitaient de l’ignorance des villageois. D’autres vont jusqu’à dire que ce sont les nobles, les seigneurs, ou bien encore les Anglais qui ont soulevé les paysans. Quant aux documents publiés par le Comité des recherches, en janvier 1790, ceux-ci tendent plutôt à représenter toute l’affaire comme un malentendu, des exploits de brigands qui ont dévasté les campagnes, et contre lesquels la bourgeoisie s’est armée et qu’elle a exterminés.

On comprend aujourd’hui combien cette manière de présenter les choses est fausse, et il est certain que si quelqu’un se donne un jour la peine de dépouiller les archives et d’étudier à fond les documents qui s’y trouvent, il pourra faire une œuvre de haute valeur : œuvre d’autant plus nécessaire que les soulèvements de paysans continuèrent jusqu’à l’abolition des droits féodaux par la Convention, au mois d’août 1793, et jusqu’à ce que les communes eussent reçu le droit de reprendre les terres communales qui leur avaient été enlevées pen-

  1. En outre, les numéros du 24 novembre 1789 au 3 février 1790 ont été également refaits en l’an IV.