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dalité, eussent régné, peut-être, encore un siècle, — comme en Russie[1].

Il faut lire Brissot pour comprendre tout ce que préparaient les bourgeois d’alors pour la France, et ce que les Brissotins du vingtième siècle préparent encore, partout où une révolution va éclater.

« Les troubles de l’Eure, de l’Orne, etc. », dit Brissot, « ont été causés par les prédicateurs contre les riches, contre les accapareurs, par les sermons séditieux, sur la nécessité de taxer à main armée les grains et toutes les denrées. »

Et à propos d’Orléans : « Cette ville, raconte Brissot, jouissait, depuis le commencement de la Révolution, d’une tranquillité que n’avaient pas même altérée les troubles excités ailleurs par la disette des grains, quoiqu’elle en fût l’entrepôt… Cette harmonie entre les pauvres et les riches n’était pas dans les principes de l’anarchie ; et un de ces hommes, dont l’ordre est le désespoir, dont le trouble est l’unique but, s’empresse de rompre cette heureuse concorde, en excitant les sans-culottes contre les propriétaires. »

« C’est encore elle, l’anarchie », — s’écrie Brissot, « qui a créé le pouvoir révolutionnaire dans l’armée » : « Qui peut maintenant douter, — dit-il — du mal

  1. Louis Blanc a très bien défini Brissot en disant qu’il était de ces hommes qui sont « aujourd’hui républicains avant l’heure, et demain révolutionnaires attardés », gens qui n’ont pas la force de suivre le siècle, après avoir eu l’audace de le devancer. Après avoir écrit dans sa jeunesse que la propriété c’est le vol, son respect pour la propriété est devenu tel qu’au lendemain du 4 août il blâmait l’Assemblée pour la précipitation qu’elle avait mise à lancer ses décrets contre la féodalité. Cela, à un moment où les citoyens s’embrassaient dans la rue pour se féliciter de ces décrets.