Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/481

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Rhône : « Le gouvernement fédératif ne convient pas à un grand peuple, à cause de la lenteur des opérations exécutives, de la multiplication et de l’embarras des rouages »[1]. Au fait, on ne trouve aucune tentative sérieuse d’organisation fédérative dans le projet de constitution que les Girondins soutinrent en 1793. Il y restèrent centralistes.

D’autre part, Louis Blanc parle, à mon sens, beaucoup trop de la « fougue » des Girondins, de l’ambition de Brissot se heurtant à celle de Robespierre, des blessures que « les étourdis Girondins » portèrent à l’amour-propre de Robespierre et que celui-ci ne voulut pas pardonner. Et M. Jaurès, du moins dans la première partie de son volume sur la Convention, exprime la même idée[2], — ce qui ne l’empêche pas, plus loin, lorsqu’il arrive à l’exposé de la lutte entre le peuple de Paris et la bourgeoisie, d’indiquer d’autres causes, bien plus sérieuses que les conflits d’amour-propre et « l’égoïsme du pouvoir ».

Certainement, la « fougue » des Girondins, si bien dépeinte par Louis Blanc, la lutte des ambitions, tout cela existait et envenimait le conflit. Mais la lutte entre Girondins et Montagnards a eu, nous l’avons déjà dit, une cause générale infiniment plus profonde que toutes

  1. Aulard, Histoire politique, p. 264. — « Je ne sache pas que personne en ait réclamé l’honneur », dit Thibaudeau, parlant du « fédéralisme » des Girondins (Mémoires sur la Convention et le Directoire, t. I, Paris, 1824, p. 38). Quant à Marat, il est très explicite dans son numéro du 24 mai 1793, p. 2 : « On a longtemps accusé de fédéralisme les meneurs de cette infernale faction : j’avoue que je n’ai jamais partagé ce sentiment, quoiqu’il me soit arrivé quelquefois de reproduire cette inculpation. »
  2. La Convention, pp. 388, 394, 396, aussi 1458.