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DU BRIGAND
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lui, et cependant je ne puis chasser son image de mon esprit ; il me semble que je pourrais passer ma vie à l’entendre et à le voir, tant il est aimable, tant il s’exprime avec douceur et avec tendresse ; je pense continuellement à lui… je le vois partout… enfin, je l’aime, Julienne, oui, je l’aime ; et pourtant vous connaissez mon père, s’il venait à l’apprendre !

Helmina ne put résister plus longtemps, elle, se cacha le visage dans ses deux mains et pleura amèrement.

— Pourquoi, ma chère Helmina, vous abandonner à un chagrin aussi terrible, sans connaître les dispositions de votre père ?

— Je ne les connais que trop, Julienne, il me les a apprises plus d’une fois ; il n’y a pas plus que deux semaines encore, si vous saviez le tableau peu avantageux qu’il me fit du mariage et de l’amour ! et vous croyez qu’aujourd’hui il puisse entendre favorablement…

— Il faut l’essayer.

— Jamais, jamais je ne l’oserai.

— Et si j’osais, moi ?

— Il rira de vous, il ne vous écoutera pas.

— Eh bien ! je conterai tout à Madelon et à Maurice ; votre père ne rira pas de tout le monde, je suppose ; il finira par le croire.

— Prenez garde, Julienne, mon père a une terrible colère ; s’il allait se fâcher !

— Laissez-moi faire, Helmina ; regagnons la maison, il n’est peut-être pas bon pour vous de rester si longtemps dehors ; le soleil commence à baisser, allons.

Helmina s’appuya sur le bras de Julienne.

Elle avait essuyé ses larmes et repris son air de calme et de sérénité apparente. En arrivant chez elles, les jeunes filles se retirèrent dans leur chambre, et Helmina pria Julienne de lui dire ce qu’elle savait de Mme La Troupe. Julienne lui fit le récit suivant, récit peut-être trop naïf et trop détaillé,