Page:L'envers de la Guerre - Tome 1 - 1914-1916.djvu/93

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opaque, par endroits, rend illisibles les noms de rues et les numéros de maisons. Les boutiques, y compris les débits, sont toutes closes. Les tramways sont arrêtés. Il n’y a pas d’autobus ; les voitures particulières sont rares. Enfin, les gens sortent peu et circulent peu. Et tout cela fait un désert d’ombre.

— Briand dit du Conseil des ministres que c’est le dernier salon où l’on ne cause pas.

— À Revigny, une vieille châtelaine héberge un état-major allemand qui tue la basse-cour, assèche l’étang, abat les chevreuils. Elle se plaint à un officier : « J’ai déjà eu le malheur d’héberger les vôtres en 1870, mais ils ne se conduisaient pas comme vous. » À quoi l’officier ricane sèchement : « Ce n’est pas la même guerre. »

On prête en effet aux Allemands, au début de la campagne, l’intention de supprimer tout en France, non pas seulement pour l’horreur exemplaire, mais pour l’extinction de la race. Tout se saura… Si l’on ne peut pas croire à cette systématisation sur les preuves actuelles, on ne peut pas s’expliquer, en tout cas, leurs razzias de populations civiles, des villages emmenés, femmes et vieillards compris.

De même qu’on a publié un rapport officiel sur les atrocités, on en a publié un autre sur ces rafles, qui dépasse le premier en stupéfiante horreur. Car il ne s’agit plus de la sadique excitation consécutive au massacre.

— J’entends des gens regretter des produits austro-allemands qui leur manquent : la ouate thermogène, le Kummel Eckau.

— On m’assure que certains généraux ont interdit le port du pantalon de velours et même de certains