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UN DIVORCE

— Puisque vous voilà, vous allez m’indiquer au juste où se trouve votre atelier ; car, telle que vous me voyez, je vas y faire une visite.

— Ah ! ah ! fort bien ; vous voulez essayer de nos produits ?

— Ma foi ! ce sera une économie, puisqu’on ne voit jamais la couleur de votre argent, pas plus que celui de votre associé.

— Voyons ! voyons ! est-ce que vous me cherchez noise ?

— Je ne dis trop rien pour vous, parce que vous êtes un parent, et que d’ailleurs vous nous amenez du monde ; mais il faut pourtant que j’aie un billet de votre Sargeaz, qui ne met plus les pieds chez nous depuis que je refuse de lui faire crédit, et je lui porte sa note, qui ne va pas à moins de trois cents francs. C’est qu’il faut que je fasse tout, moi ! Fonjallaz est si poule mouillée, qu’il a peur de demander aux gens ce qui lui est dû. Il ne pense pas non plus qu’il aura des vins à payer, le trente. Nous faisons un triste métier ; toujours fournir aux autres, et il ne nous rentre rien. Il ne faudrait pas compter cette fois sur Desfayes. Je ne voudrais pas être toujours à lui demander.

— Bah ! n’est-il pas trop heureux ? Car enfin, en retour, vous lui donnez bien quelque chose ?

— Vous êtes une mauvaise langue, Monadier. Je n’entends pas que vous me parliez comme ça. Je trouve aussi que vous feriez beaucoup mieux de ne pas tant pousser Fonjallaz à acheter ; car il ne sait ce qu’il fait ; et, quand on n’a pas d’avance, il ne faut pas se lancer trop. Mais, vous ne craignez rien pour les autres, vous, et tout le monde dit que vous avez mis ce pauvre Sargeaz dans une belle situation.