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UN DIVORCE

que c’est tout simple que je sois venue dans votre banque. Cette bêtise ! comme si c’était là qu’on pourrait imaginer de se donner un rendez-vous ! Il faut vraiment que votre pauvre femme ait le cerveau fêlé. Pourtant, si j’avais su, je me serais adressée à M. Morlat, bien que je ne le connaisse point ; car enfin on n’aime pas à se trouver dans de pareils tripotages, quand même ils n’ont pas le sens commun.

Elle salua bravement tout le monde et sortit, et le jeune Balançon frappa des mains pour l’applaudir, aussitôt que M. Desfayes, qui l’avait écoutée à peine, fut rentré dans son bureau.

— Assez de plaisanteries comme ça, messieurs, dit le premier commis d’une voix sévère ; si vous étiez restés à vos places, moi qui ne vous ai suivis que pour vous rappeler sans bruit, je ne me trouverais pas compromis aussi, grâce à vous, dans cette sotte affaire.

— Ah ! par exemple ! s’écrièrent les autres, vous écoutiez fort bien, et ne nous avez rien dit.

Ils se turent de nouveau à l’aspect de M. Dubreuil, qui, ayant entendu des rumeurs inusitées, sortait de son cabinet.

Ferdinand avait retrouvé sa femme dans le fauteuil où il l’avait laissée ; pâle et tremblante, elle commençait à verser en torrents de larmes un peu de la passion qui l’étouffait, tandis que Mathilde, debout près d’elle, lui tenait les mains, en l’exhortant de sa parole ferme et brève.

— Vous venez de me déshonorer aux yeux de toute la ville, s’écria-t-il avec rage, et je ne vous le pardonnerai jamais !

— C’est vous-même qui vous êtes déshonoré, mon-