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UN DIVORCE

quoiqu’elle eût été, certes, bien froissée de certains propos, qu’elle ne méritait pas ; mais enfin, réellement, elle avait pitié de cette pauvre madame Claire, et, loin de parler contre elle, si plus tard elle trouvait l’occasion de lui renvoyer l’enfant, elle le ferait. Il fallait attendre ; on verrait ; pour le moment, la chose était impossible.

C’était à Camille, venu sur la route au-devant d’elle, qu’Anna racontait ceci. Elle ajoutait, en sanglotant, que Fernand s’était jeté dans ses bras en la voyant, et qu’il avait demandé à grands cris à retourner auprès de sa mère. Anna s’était efforcée de le calmer ; mais qu’il pleurât ou ne pleurât point, sa douleur restait en lui ; on le voyait à son air, à sa poitrine oppressée. Il avait dû avoir une crise ; car il était pâle, abattu, brisé ; jusque-là on n’avait pu lui faire prendre aucune nourriture, et Anna seule avait obtenu qu’il mangeât un peu. Ensuite, elle l’avait couché, en lui donnant les soins qu’il recevait d’habitude, et madame Fonjallaz, qui était présente, regardait tout cela en souriant de mépris.

— Mon ami, dit la jeune fille en achevant son récit, cet enfant est une sensitive ; s’il reste avec eux il est perdu.

— Peut-être, en effet, dit Camille, a-t-on malheureusement exagéré les soins que sa santé demandait ?

— Je ne crois pas ; s’il eût été mal soigné, il ne serait plus. Tant d’enfants meurent en bas âge par l’inintelligence de ceux qui les soignent ! Moi, je crois qu’un enfant vient au monde pour vivre et qu’il ne devrait pas mourir sans avoir vécu. Mais on connaît et l’on comprend si peu ces petits êtres ! Claire, elle, avait trouvé ce qu’il fallait à son fils ; elle le connaît bien, et c’est par elle qu’il vit depuis sa naissance. Mais il est encore loin, le pauvre bien-aimé, d’être fort !