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UN DIVORCE

perdre l’appétit, et rester des heures entières assis dans un coin, songeur. Quelquefois son père lui disait : Fernand ! que fais-tu là ? Il tressaillait alors, une rougeur venait à ses joues, et, sans répondre, il montrait un livre, qu’il tenait mais ne lisait pas.

On décida de l’envoyer à l’école, et que cela le distrairait. L’étude, en effet, l’attira beaucoup, et il fit des progrès rapides ; mais il n’eut pas de camarades ; pendant les récréations, il lisait, ou pleurait tout doucement, dans ses mains fermées, en feignant de dormir.

Après un mois de séjour à Lausanne, Camille, voyant Claire encore indécise, voulut partir ; mais le cœur de la pauvre femme se brisant à l’idée de cette séparation nouvelle, elle le supplia en pleurant de ne point l’abandonner. De son côté, madame Grandvaux, inquiète pour sa fille des mauvais propos, la pressa d’épouser le jeune Français, lui représentant que plus qu’une autre elle avait besoin d’un protecteur. Claire se maria. Elle aimait Camille ; mais le bonheur, elle n’y songeait plus.

Le premier acte de Camille, comme époux de Claire, fut d’écrire à M. Desfayes pour le persuader, par toutes les raisons qu’il put invoquer, de rendre Fernand à sa mère. Il alléguait le caractère particulier de l’enfant et sa frêle santé, les troubles domestiques bien connus qui résultent des préférences d’une belle-mère, et il engageait sa parole et offrait de prendre, s’il le fallait, des engagements écrits pour assurer à Fernand l’éducation la plus complète et la plus brillante. M. Desfayes répondit par quelques paroles sèches, où il déclarait qu’il voulait et devait garder son fils ; qu’il trouvait fort étranges de semblables propositions, et que, s’il eût jamais été