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UN DIVORCE

avoir quelque chose à faire dans ces unions menteuses, où l’un est victime et l’autre bourreau.

— Assurément, Dimitri ; l’égalité de droits et la défense, au lieu de l’écrasement du faible.

— Et cependant, mon père, c’est vous qui étiez innocent, et c’est vous qui avez souffert.

— C’est le droit des plus forts, hommes ou femmes, répondit le vieillard avec un doux sourire. Nous autres d’à présent, par trop de réaction contre la déification chrétienne de la souffrance, nous raisonnons toujours comme si la vie n’avait d’autre but que le bonheur. Non pas ; c’est d’agrandir la vie en soi et pour les autres ; nous avons donc été suffisamment heureux, si nous avons acquis plus de connaissance et plus d’amour. D’ailleurs, mon fils, je n’étais pas innocent, comme tu le dis, et j’ai été puni justement par cette loi des choses, qui, généralement comprise, suffira un jour à remplacer notre juridiction actuelle. Moi aussi, j’avais abordé le mariage sans religion ; j’avais choisi ma femme pour sa beauté seule, et sans autre pensée que de satisfaire la passion qu’elle m’inspirait. Aussi, n’ai-je trouvé que ce que j’avais apporté moi-même, l’amour des fragiles idoles. Nous nous sommes instruits et fortifiés l’un par l’autre, et je ne regrette rien.

Ils rentrèrent à la maison pour savoir des nouvelles de Claire, et apprirent qu’elle venait de se mettre au lit. Elle était réellement malade. Camille avait envoyé chercher le médecin qui soignait Fernand, et qui rassura la pauvre mère. Mais elle demeura alitée aussi longtemps que l’enfant le fut lui-même, et ne put guérir qu’en apprenant sa guérison.

Alors Camille se décida à faire à sa femme le grand sacrifice que jusque-là il avait retardé, et l’on fit un par-