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LES TROIS COCUS

— Profane, vous avez été singulièrement favorisé ; nous vous avons autorisé à voir un coin du paradis mahométan. C’est là une faveur que vous devez reconnaître…… Êtes-vous prêt à nous donner des gages, mais des gages sérieux, de votre reconnaissance ?

— Tant que vous en voudrez. Faut-il que j’embrasse l’honorable présidente ?

Ce coquin de Chaducul était toujours disposé à embrasser.

— Non ! répliqua Bruscarabille. Le temps n’est plus aux épreuves agréables. Nous vous demandons une grave promesse, une seule. Jurez-nous de ne jamais plus violer votre vœu de chasteté.

— Ah ! bien, non, par exemple ! clama Romuald qui ne s’attendait pas à cette boîte. Tout ce que vous voudrez, mais pas ça !

L’assistance éclata en bravos frénétiques.

Le néophyte avait bien répondu.

— Alors, continua l’imperturbable Bruscambille, puisque vous ne voulez pas renouveler votre serment de chasteté, vous êtes donc disposé à renier votre foi catholique ?

— Je m’en moque bien, du catholicisme !… C’est bon pour les naïfs, cette balançoire-là… Quant à nous, nous prêchons tout ce qu’on veut, mais nous n’en faisons qu’à notre tête.

— Embrasseriez-vous le mahométisme ?

— Oui, surtout si c’est vous, chère présidente inconnue, qui êtes le mahométisme.

— Vous acceptez de devenir musulman ?

— Parbleu ! musulman de cœur et d’âme, je réclame tout de suite un petit sérail de houris.

— Vous l’aurez ; mais, ou ne devient pas musulman sans subir une sorte de baptême… Vous me comprenez.

— Parfaitement. C’est aussi le baptême des juifs, et le calendrier catholique célèbre cette machine-là à la date du premier janvier.

— Eh bien, acceptez-vous ?

L’abbé eut une seconde d’hésitation ; puis, il reprit bravement :

— C’est entendu, j’accepte… J’accepte tout, pourvu que j’aie au plus tôt ma place au paradis du prophète.

Deux maçonnes apportèrent une gigantesque paire de ciseaux et les agitèrent en les faisant grincer avec fracas. Papillon chatouilla un instant le nez du vicaire au moyen d’une plume d’oie. Puis, tout à coup, le bandeau tomba, et