Page:Léo Taxil - Les trois cocus.pdf/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
187
LES TROIS COCUS

— Comprends pas.

— Un péché mortel à cause de moi !

— C’est possible… Je ne dis pas non, si ça peut vous faire plaisir.

— Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! quel malheur !

Enfin, Scholastique accepta — il le fallait bien — son clysopompe raccommodé un dimanche.

Mais elle avait je ne sais quels sinistres pressentiments.

La première fois qu’elle s’en servit — ô épouvante ! — elle eut, dans la journée même, une colique atroce.

Était-ce le doigt de Dieu qui se vengeait ?

Scholastique confia son chagrin à Philéas (c’est-à-dire à son abbé Groussofski) et à Irlande.

Tous deux furent d’avis que ce qui arriva il était déplorable, et que Scholastique devait offrir sa colique à Dieu en expiation du péché mortel du lampiste.

Ainsi il fut fait.

Seulement, la colique persista.

Alors, l’infortunée dévote se sentit envahie par un effroi extraordinaire.

Ce n’était peut-être pas la colique qui avait établi domicile en elle ; c’était Satan en personne.

En effet, voici quel était le raisonnement limpide de la pauvre fille :

Dès le péché mortel du lampiste, Lucifer avait dû s’installer dans le clysopompe profanateur et sacrilège.

Elle avait commis l’imprudence de mêler un lavement à l’esprit diabolique, et, sous le mouvement du piston, lavement et diable mêlés s’étaient introduits dans ses entrailles.

Rien n’était moins discutable.

Je vous laisse à penser si Scholastique n’en menait plus large. Elle se tordait, en proie au malin, récitant à tous les saints du calendrier des litanies et des oraisons jaculatoires.

Hélas ! trois fois hélas ! Satan tenait bon et se refusait à déguerpir.

Irlande proposa à sa sœur de recourir à l’exorcisme.

On expliqua à l’aumônier ce que signifiait ce mot français qu’il n’avait jamais entendu.

— C’est ce que nous appelons, dit-il, en polonais, une « tartanpouille. »

Dans le bréviaire que les deux sœurs avaient acheté à l’abbé, il n’était pas question des exorcismes ; mais Philéas ne s’embarrassait pas pour si peu.

— Je vous en flanquerai un de mon pays, déclara-t-il ; le Père Éternel entend toutes les langues.