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L’HÉRÉDO.

3° Celles chez qui les hérédismes du moi sont oscillants, instables et laissent périodiquement les deux soi en présence.

Chacune de ces catégories peut être définie par un poète, puisque les poètes sont les interprètes et les annalistes de l’amour, puisque l’amour est insaisissable ailleurs que dans les chants qu’il inspire.

Dante est le poète de l’attraction des soi, de cette gravitation morale qui recule sans cesse devant l’analyse, mais que la raison en nappe peut éclairer. La Divine Comédie est du plus haut intérêt, quant au point de vue qui nous occupe. Elle est une décharge en masse de tous les hérédismes fécondés par l’instinct génésique, décharge qui laisse finalement en présence, ainsi que dans les solitudes stellaires, le soi de l’altissime poète et celui de sa Béatrice. Il a décrit cette confrontation et le sentiment bienheureux qui l’accompagne dans la splendeur de son « Paradis », succédant aux tortures, évidemment congénitales, de « l’Enfer » et du « Purgatoire ». C’est le cas le plus saisissant d’une purge complète de la personnalité héritée dans une œuvre d’art, que couronne l’apothéose de la personnalité neuve