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L’HÉRÉDO.

Je me rappelle avoir eu, voici quelques anuées, alors que je méditais déjà ce chapitre de l’Hérédo, une discussion avec un médecin qui venait d’opérer sur lui-même une expérience dangereuse. Esprit fort confus, très orgueilleux, dominé par une ascendance complexe, il affirmait que son sacrifice humanitaire était supérieur à tout sacrifice patriotique. Je lui dis : « C’est un atavisme huguenot, docteur, et dans la ligne mâle, qui vous souffle certainement cette lourde erreur. » Il devint très rouge, mais dut convenir que le dit atavisme était réel et dans les conditions indiquées. Les hérédismes ethniques et religieux sont en effet aisément discernables, avec un peu d’habitude. Profondément imprimés, souvent répétés dans l’ascendance, ils pénètrent et imprègnent les appréciations, les jugements, les élans, les calculs, les réticences et jusqu’aux instincts. En vain essayerait-on de les dissimuler à l’observateur averti.

La pitié est une forme de l’amour humain qui s’attache aux imperfections, aux erreurs, aux manques, aux maux, à la déchéance du moi de notre prochain. Aussi fait-elle aisément appel aux hérédismes, encore que son point