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L’HÉRÉDO.

d’une destinée invisible et inconnaissable ; d’après lesquelles notre raison ne serait qu’une mince pellicule sur l’immense abîme de la sensibilité ou de l’inconscience ; d’après lesquelles la lumière de l’intelligence serait un simple fumeron à côté de la torche de l’intuitivisme ; d’après lesquelles les idées, les mots, les souvenirs seraient autant de petites pièces, rangées séparément et par travées, susceptibles néanmoins de réunion et d’agglomération périodiques — d’association comme l’on dit — étiquetées dans tout autant de petites cases du cerveau, seul et unique siège de la pensée ; d’après lesquelles la construction histologique et anatomique dudit cerveau expliquerait très suffisamment toutes les complexités, toutes les finesses et toutes les grandeurs de ladite pensée ; d’après lesquelles l’hérédité, conçue d’ailleurs, non dans son ensemble psycho-organique, mais seulement dans ses modalités pathologiques, pèserait irrémédiablement sur la famille et l’individu, sans aucun espoir de réaction, ni de relèvement ; d’après lesquelles enfin la Science, avec un grand S, serait à la veille d’avoir dit son dernier mot, lequel correspondrait à ceci : néant.