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CHAPITRE  VII
le mot et ce qu’il évoque (suite)

L’évocation verbale se produit, soit par l’essentiel du mot, c’est-à-dire par sa racine, dans la mémoire héréditaire, soit par sa sonorité et sa forme, dans la mémoire individuelle. Le premier cas (d’évocation par la racine, par l’essentiel du mot) relève du soi et de l’impulsion créatrice. Le second (d’évocation formelle et sonore) relève de l’instinct génésique, grand créateur en nous d’illusions. Le premier cas est, en nous, source de sincérité ; et plus il est fréquent, plus la sincérité sera grande. Le second cas est en nous, penchant au mensonge et à la fable, et plus il est fréquent, plus le mensonge sera fréquent. Les cas intermédiaires, d’oscillation entre les deux évocations et les deux mémoires, produisent la tendance à la duplicité, qui peut être elle-même accidentelle ou chronique.

Ce que je dis ici de l’évocation verbale s’applique aussi bien au mot non émis, mais vu et entendu