Page:Léon Frapié - La maternelle, 1904.djvu/215

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les mains dans ses poches de tablier, riante, rengorgée, pérore à mon gré :

— Une fois que maman s’avait disputée avec sa patronne, j’ai été au poste avec mon petit frère Mimile dans les bras ; il braillait tellement pour teter, que le brigadier a renvoyé maman tout de suite. Maintenant que Mimile ne tette plus, puisqu’il est mort, Mme Chartier me prête sa petite Lisette pour aller chercher maman au poste, mais Lisette pleure pas assez fort, rapport qu’elle est née à sept mois, qu’on dit, alors je suis obligée de la pincer…

Richard, philosophe, intervient avec ce talent qu’ont certains enfants de répéter et de prendre à leur compte les dires des grandes personnes :

— C’est le monde renversé, c’te patronne-là : c’est elle qui se pique le nez et qui cherche des raisons aux ouvrières !

Irma, contrariée, mais n’y pouvant rien :

— Oui, c’est le monde renversé !

Léon Chéron ne bavarde pas ; il court de-ci, de-là, ramasser les pailles qui roulent.

Moi. — Les jours allongent, on peut jouer le soir dans la rue ; avez-vous recommencé le traîneau ?

Richard. — Le traîneau de Kliner est cassé, y a une roulette qu’est tombée dans l’égout, faudrait la remplacer par une roulette de lit. J’ai essayé d’en enlever une au lit à maman, j’ai pas pu… Mais, de ce moment, c’est la guerre entre les Plâtriers et les Panoyaux, parce que les ceusses de l’école des Panoyaux ont chiné nos croix qui sont pas si belles