Page:Léon Frapié - La maternelle, 1904.djvu/238

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sur son bras et me foudroie de ses prunelles irritées :

— Vous n’allez pas faire la bêtise de demander à être femme de service à l’École normale ? En v’là de l’orgueil !… Ça vous quittera ma petite… Parbleu ! « attachée » à l’École normale, ça frime, on se gobe… Mais, j’en parle savamment, j’y ai été volée, moi : telle que vous me voyez j’ai été pendant dix-huit mois auxiliaire à l’École normale — eh bien, croyez-moi, c’est une sale boîte… Et puis, tenez, voulez-vous que je vous dise encore, une chose qui m’inquiète pour vous ? C’est l’ambition qui vous perdra, na !

Il faut noter que Mme Paulin se considère comme « appartenant à l’enseignement » et que, par conséquent, elle a été obligée de prendre parti dans la querelle entre normaliennes et non normaliennes.

Elle est contre les normaliennes.

— Ces poseuses-là ne sont bonnes qu’à jeter de la poudre aux yeux. Dame ! pour cela, elles s’y entendent.

Et maintenant, grâce à elle, je suis à peu près renseignée : j’ai pu compléter ses histoires par les modèles placés sous mes yeux et (à un certain point de vue) par l’analyse de mon propre cas. Voici donc l’opinion que je me fais.

Les jeunes filles internes à l’École normale mènent une vie incomplète et artificielle. D’abord elles sont trop séparées du dehors, trop éloignées des affections naturelles et du spectacle du monde ;