Page:L’Étourdi, 1784.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
49
L’ÉTOURDI.


careſſes, & la ſuppliai, en embraſſant ſes genoux, de ne pas me faire prendre un état pour lequel je n’avais nulle vocation, mais beaucoup de dégoût. Mes larmes ne firent aucun effet. Ma mere frémit de ma propoſition. Puis, ſe recueillant en elle même, elle me dit d’un ton ferme d’obéir ou de rénoncer à ſon amitié, & à celle de toute ma famille qui me parlait par ſa bouche — perdre l’amitié de mes parens ! Ah ! plutôt mourir mille fois, Madame, lui dis-je, avec des regards & des ſoupirs qui peignaient aſſez ce qui ſe paſſait dans mon ame. Dès demain je prens le voile : il n’eſt rien, non rien que je ne faſſe pour mériter votre tendreſſe, & celle de mon pere. Ce n’eſt ; pas l’acheter trop cher que de la payer de ma liberté.

À peine eus-je achevé de parler que ma mere me ſerre dans ſes bras, m’accable de careſſes, d’éloges, & me donne les noms les plus tendres. Elle fait auſſitôt part à l’Abbeſſe que je ſuis décidée à renoncer aux dangers qu’offre un monde pervers & trompeur, pour aſ-

  Tome I. Partie II.
C