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L’ÉTOURDI.


d’amie. Je me livrai au déſeſpoir, & certainement, ſi j’euſſe reſtée au couvent, je n’aurais pas ſurvécu à ſœur Urſule.

Le jour approchait où j’allais conſommer le ſacrifice, où des chaînes éternelles allaient m’attacher à ma priſon, quand on vint me dire qu’on m’attendait au parloir. Quelle fut ma ſurpriſe d’y trouver mon pere.

Ma chere fille, me dit, en ſanglotant ce reſpectable vieillard, c’eſt contre mon gré que ta mere t’a forcée de prendre le voile pour enrichir ton frere qui était ſon idole. Comme c’eſt d’elle que je tiens toute ma fortune, & qu’elle menaçait de la diſſiper ſi je m’oppoſais à ce que tu te fis religieuſe, j’ai été forcé d’y conſentir. Hélas ! le ciel m’en a bien puni… Tu n’a plus de frere !… Je n’ai plus que toi pour m’aider à ſupporter ma vieilleſſe. Viens ma chere fille, viens en faire la conſolation, ne me refuſe pas cette grace. — La ſituation dans laquelle je me trouvai, ce qui ſe paſſait dans mon ame peut bien s’imaginer, mais non pas ſe dépeindre.

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