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L’ÉTOURDI.

Sur le compte que ma mere rendit de ſon meſſage, mon pere décida de faire enfoncer ma porte ; il envoya à cet effet deux domeſtiques munis de haches.

Au premier coup qu’ils donnerent, je les menaçai de tirer deſſus s’ils continuaient. La peur les eſprit les conduiſit à leur maître qui les raſſura en leur diſant que j’étais ſans arme à feu. Encouragés par ce qu’ils viennent d’apprendre, ils remettent la main à l’œuvre, & allaient enfin faire brêche. Je les ſommai une ſeconde fois de ſe retirer ; comme ils furent ſourds à ma voix, je pris l’un des piſtolets de poche que j’avais ſur moi, & qu’apparemment mon pere ne me ſoupçonnait pas, je fis feu ſur les ouvriers ; il était chargé de trois balles. Heureuſement une ſeule attrapa le plus hardi au bras, & ne lui fit qu’une légere bleſſure. Il fut ſe plaindre à M. de Falton qui écouta alors la voix de la nature & de la prudence ; il vint à ma porte me dire avec aménité, ouvre c’eſt moi, c’eſt ton pere ; refuſera-tu de le voir ? Non, m’écriai-je, en me proſternant