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L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


bien que l’on m’en avait touché quelque chose, mais j’avais peine à le croire.

— Cela est hors de doute, reprit Céladon, et je vous apprendrai de plus que ce barbare a tellement répandu sa criminelle flamme sur cette honteuse famille que le petit frère n’est pas oublié ; il lui donne souvent des preuves de son amour ; mais le pauvre petit malheureux n’en voit rien, car ce n’est jamais par devant qu’il le caresse, mais à la manière de Sodome, c’est-à-dire par derrière.

— Ô ciel ! s’écrièrent Poquet et Le Rocher, ô juste ciel ! où est ta foudre, et comment ton soleil peut-il éclairer de si noirs forfaits ?

— Vous voilà bien étonnés, leur dit Céladon ; il semble, à vous entendre, que vous n’ayez jamais lu les amours de ce débauché et que vous ignoriez les divers crimes dont il a obscurci son divin flambeau. Et, d’ailleurs, que savez-vous si ce n’est pas dans l’épaisseur des ténèbres qu’il lâche la bride à ses appétits ? La Nuit est une déité si lascive et tellement débordée qu’il n’y a point d’extrémités amoureuses qu’elle n’autorise, et de Marle s’est lié avec elle d’une étreinte tellement indissoluble, en reconnaissance des biens qu’il reçoit journellement de son bénéfice, que pour lui être tout à fait conforme, il fait toujours sombre dans son esprit et n’y laisse jamais briller le moindre rayon de lumière. » Après que Céladon eut parlé, Le Rocher continua de lire ce