Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/65

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faisaient se mouvoir les ombres à la façon des torches, ou par la seule force d’enchantements, d’évocations, ou de signes empruntés aux étoiles observées, cette splendeur découvrait les nombreuses beautés sculptées et peintes dont, tout autour, le vénérable lieu était orné.

A peine Bradamante a-t-elle mis le pied sur le seuil de la demeure secrète que, du sein de la dépouille mortelle, l’esprit vivant lui parle d’une voix très distincte : « Que la fortune favorise tous tes désirs, ô chaste et très noble damoiselle, du ventre de laquelle sortira la semence féconde qui doit honorer l’Italie et le monde entier !

« L’antique sang issu de Troie, en toi mêlé par ses deux meilleures sources, produira l’ornement, la fleur, la joie de la plus éclatante lignée qu’ait jamais vu le soleil entre l’Inde et le Tage, le Nil et le Danube, entre le pôle antarctique et l’Ours. Parmi ta postérité parvenue aux honneurs suprêmes, on comptera des marquis, des ducs et des empereurs.

« Les capitaines et les chevaliers robustes qui en sortiront, feront, par le fer ou le génie, recouvrer à leur chère Italie l’antique honneur de ses armes invincibles. De là aussi tireront leur sceptre, les justes princes qui, comme le sage Auguste et Numa, sous leur bon et doux règne feront revenir le primitif âge d’or.

« C’est donc pour cela que la volonté du ciel, qui t’a dès le principe choisie pour être la femme de Roger, t’ordonne de suivre courageusement