Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 1.djvu/66

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ton chemin ; car nulle chose ne pourra t’arrêter ni te détourner de cette pensée que tu dois terrasser à la première rencontre ce larron maudit qui te détient tout ton bien. »

Merlin se tut, ayant ainsi parlé, et laissa agir la magicienne qui se préparait à montrer à Bradamante l’aspect de chacun de ses descendants. Elle avait évoqué un grand nombre d’esprits — je ne sais si c’était de l’enfer ou de quel autre séjour — et tous étaient rassemblés en un seul lieu, sous des vêtements variés et des physionomies diverses.

Puis elle ramène avec elle la damoiselle dans la chapelle où elle avait tout d’abord tracé un cercle, qui pouvait la contenir tout entière et la dépassait encore d’une palme. Et pour qu’elle ne soit pas maltraitée par les esprits, elle la recouvre d’un grand pentacule et lui dit de se taire et de se contenter de regarder. Ensuite elle prend son livre et parle avec les démons.

Voici, hors de la première caverne, qu’une foule d’esprits s’accroît autour du cercle magique. Mais dès qu’ils veulent y entrer, la voie leur est interdite, comme si un mur et un fossé l’entouraient. Dans la cavité où le beau mausolée renferme les ossements du grand prophète, les ombres rentraient, après avoir trois fois tourné autour du cercle.

« Si je voulais — dit l’enchanteuse à Bradamante — te dire les noms et les actes de tous les esprits qui, avant d’être nés, viennent d’être évo-