Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/301

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qu’il aime tant, il est près de tomber de selle.

Mais, de même que l’arc de fin acier, solide et bien trempé, se redresse avec d’autant plus de force qu’il a été plus courbé par le martinet et le levier, et rend plus de mal qu’il n’en a reçu, ainsi l’Africain se relève aussitôt, et porte à son ennemi un coup deux fois plus fort.

Rodomont frappe le fils du roi Agrican juste à l’endroit où il a été frappé lui-même. Il ne peut cependant lui blesser le visage, défendu par les armes troyennes ; mais il étourdit tellement le Tartare, qu’il ne sait pas s’il fait jour ou s’il fait nuit. Rodomont, plein de fureur, porte sans s’arrêter un autre coup qu’il dirige contre la tête.

Le cheval du Tartare, effrayé par l’épée qui siffle en retombant de haut, fait un saut en arrière pour l’éviter, et vient ainsi, à son propre détriment, en aide à son maître. L’épée le frappe, au beau milieu de la tête, d’un coup destiné au cavalier et non à lui. La malheureuse bête n’avait pas le casque de Troyes, comme son maître ; aussi elle est tuée net.

Elle tombe, et Mandricard se retrouve sur pied. Revenu de son étourdissement, il fait tournoyer Durandal. La vue de son cheval mort allume sa colère comme un vaste incendie, et le met hors de lui. L’Africain cherche à le heurter de son destrier, mais Mandricard ne bronche pas plus que l’écueil battu des ondes. Il réussit à faire tomber le destrier de son adversaire, tout en restant ferme sur ses pieds.