Page:L’Odyssée (traduction Bareste).djvu/175

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amours de Mars et de Vénus, la déesse à la belle ceinture. — « Il dit d'abord comment ces immortels s'unirent en secret dans le palais de Vulcain : Mars donna de nombreux présents à Vénus et parvint à souiller la couche du divin artisan ; mais le Soleil, témoin de leurs amoureuses unions, alla prévenir l'époux, qui, à cette affreuse nouvelle, se rendit à sa forge en méditant de sinistres desseins. Vulcain place sur un billot une énorme enclume et forme des chaînes indestructibles et indissolubles, des chaînes qui lient éternellement. Quand il a terminé son œuvre artificieuse il se rend, plein de colère, dans la chambre où était placée sa couche. Il entoure de liens les supports du lit et attache aux lambris supérieurs d'autres chaînes d'une finesse égale aux fils de l'araignée, et que nul ne pouvait apercevoir : tant ils étaient forgés avec adresse. Après avoir ainsi placé tous les liens autour de sa couche il feint d'aller à Lemnos, ville superbe qu'il chérissait le plus parmi toutes les villes de la terre. Aussitôt que Mars, l'immortel aux rênes d'or, voit s'éloigner le célèbre artisan, il ne s'endort pas ; et il se rend dans la demeure de Vulcain, brûlant d'amour pour la belle Vénus. La déesse venait de quitter son père, le puissant Jupiter, et elle se reposait à l'écart. Mars pénètre dans l'intérieur du palais, prend la main de Vénus et lui adresse ces paroles :

« Déesse chérie, allons sur cette couche nous livrer aux plaisirs de l'amour ; car Vulcain n'est plus parmi nous : il vient de partir pour Lemnos, afin de visiter les Sintiens aux sauvages accents. »

Il dit ; et Vénus désire aussi goûter le repos auprès de l'invincible Mars. Tous deux montent sur la couche nuptiale et s'endorment. Au même instant les liens forgés par le prudent Vulcain les entourent, et leurs membres ne peuvent plus ni se mouvoir ni se dégager. Alors les deux divinités reconnaissent que pour elles il n'est plus de fuite possible. Vulcain arrive aussitôt, étant revenu sur ses pas avant d'avoir touché la terre de Lemnos ; car le Soleil, qui veillait, l'avait prévenu. Vulcain entre dans sa demeure le cœur accablé de chagrins, il s'arrête sous les portiques ; une violente colère le saisit, et, pour être entendu des dieux, il s'écrie d'une voix formidable :