Page:L’Odyssée (traduction Bareste).djvu/189

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

aux nuages, nous envoie le Borée accompagné d'une affreuse tempête, et il cache sous d'épaisses nuées la terre et les ondes : tout à coup une nuit affreuse tombe du ciel. Nos vaisseaux sont emportés à travers les mers, et les voiles sont déchirées en lambeaux par la violence des vents. Nous, craignant de périr, nous plions les voiles, et nous dirigeons aussitôt nos vaisseaux vers le continent. Durant deux jours et deux nuits nous restons sur cette plage les membres accablés de fatigue et le cœur dévoré de chagrin. Mais dès que la fille du matin, Aurore à la belle chevelure, a ramené le troisième jour, nous dressons les mâts, nous déployons les voiles, et nous nous plaçons dans nos vaisseaux guidés par les vents et par nos pilotes. J'espérais enfin arriver heureusement dans ma patrie, lorsqu'on doublant le cap Malée je me vois entouré par le violent Borée, par les vagues et par les rapides courants qui me repoussent loin de Cythère.



» Pendant neuf jours j'errai sur la mer poissonneuse, emporté par le souffle impétueux des vents ; mais le dixième jour j'atteignis enfin le pays des Lotophages, peuples qui se nourrissent de la fleur du lotos[1]. Alors nous descendons sur le rivage, nous puisons de l'eau aux fontaines, et mes compagnons prennent leur

  1. Homère dit : εἶδαρ ἄνθινον (vers 84) (mets de fleurs, composé de fleurs). C'est le nom que le poète donne au fruit du lotos, que mangeaient les Lotophages (mangeurs de lotos).