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Le Chant de la Vaincue[1]



Mon maître m’a demandé de me tenir au
bord de la route de retraite et de chanter
le chant de la Vaincue.

Car elle est la fiancée qu’il honore en
secret.

Elle a ceint le voile sombre, dissimulant
son visage à la foule, le joyau sur son sein
luisant dans l’ombre.

Elle est délaissée par la lumière du jour, et
la nuit de Dieu l’attend, ses larmes éclairées
et ses fleurs trempées de rosée.

Elle est en silence et les yeux baissés, elle
a laissé derrière elle sa demeure d’où vient la
plainte dans le vent.

Mais les étoiles modulent le chant d’amour
de l’éternel à celle dont le visage est doux de
honte et de souffrance.

La porte s’est ouverte dans la chambre solitaire,
l’appel est venu.

Et le cœur des ténèbres palpite dans
l’anxiété de l’heure marquée.


Rabindranath Tagore.
  1. Le célèbre poète et professeur hindou a écrit ce poème sur la Corée à la demande de M. Choy Nam Sun, le tenace publiciste et leader Coréen. M. Tagore témoigne nettement, dans ce poème, de sa sympathie ardente envers la Corée, ainsi que la claire vision qu’il a de la situation réelle de celle-ci, dans la honte et la disgrâce.