Page:La Boétie - Œuvres complètes Bonnefon 1892.djvu/203

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encore qu’il fe cognoift qu’elle trauaille liberalement, & pour fon plaifir, & non pas par contrainte. Mais au contraire celles-là. qui tiennent grauité, eftans 35 touüours en chaife, encores qu’elles fuffent belles, donnent occasion de fe faire conter entre celles qui fe parent outre le naturel, & qui vfent des tromperies du fard. Et maintenant, dit il, ô Socrates, asseure toy _ que ma femme mife à ce ply tient la façon de viure 40 que ie luy enfeignay lors, & que ie le conte à ceste heure. Lors ie prins la parolle, & luy dis: O Ifcho- mache, il m’eft aduis que meshuy i’ay afïez bien entendu pour la premiere fois le deuoir de ta femme & ce qu’elle fait; &, pour certain, ainû que vous en 45 auez vfé tous deux, il y a de quoy vous en louër grandement 8L l’vn & 1’autre. Mais toy comment fais tu de ton coité, dy le moy à cette heure, à tin que d’vn coup tu fentes quelque plaifir de m’au©ir conté ce que tu fais, qui te tient en ti bonne reputation, &. 50 que i’aye de quoy t’eftre grandement redeuable toute ma vie, pour auoir ouy de toy, & pofîible apprins, au moins ii ie puis, entierement tout le faiét de ce bel· &—bon homme que ie cherche tant. En bonne foy, dit Ifchomache, ie te diray, & trefuolontiers, ce que i’ay 55 faiét, & que ie fais touiiours, & comment ie pafïe mon temps, mefmement à fm que tu me rabilles, fiil te semble que ie face quelque chofe qui ne soit pas bien. Et comment, dis—ie, pourroit on, sans faillir lourdement, mettre la main à rabiller vn perfonnage 60 accomply &. entierement bel-&-bon; mefmes moy, qui, selon l’opinion de plusieurs, ne sçay faire autre chose que babiller, & mesurer l’air, & conter les