Page:La Bruyere - Caracteres ed 1696.djvu/136

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d’un homme ou d’une femme, met davantage du ſien dans cette rupture, il n’eſt pas aiſé de le décider. Les femmes accuſent les hommes d’eſtre volages, & les hommes diſent qu’elles ſont légères.

18. — Quelque délicat que l’on ſoyt en amour, on pardonne plus de fautes que dans l’amitié.

19. — C’eſt une vengeance douce à celuy qui aime beaucoup de faire, par tout ſon procédé, d’une perſonne ingrate une tres-ingrate.

20. — Il eſt triſte d’aimer ſans une grande fortune, & qui nous donne les moyens de combler ce que l’on aime, & le rendre ſi heureux qu’il n’ait plus de ſouhaits à faire.

21. — S’il ſe trouve une femme pour qui l’on ait eu une grande paſſion & qui ait été indifférente, quelques importants ſervices qu’elle nous rende dans la ſuite de noſtre vie, l’on court un grand riſque d’eſtre ingrat.

22. — Une grande reconnaiſſance emporte avec ſoy beaucoup de goût & d’amitié pour la perſonne qui nous oblige.

23. — Être avec des gens qu’on aime, cela ſuffit ; reſver, leur parler, ne leur parler point, penſer à eux, penſer à des choſes plus indifférentes, mais auprès d’eux, tout eſt égal.

24. — Il n’y a pas ſi loin de la haine à l’amitié que de l’antipathie.

25. — Il ſemble qu’il eſt moins rare de paſſer de l’antipathie à l’amour qu’à l’amitié.

26. — L’on confie ſon ſecret dans l’amitié ; mais il échappe dans l’amour. L’on peut avoir la confiance de quelqu’un ſans en avoir le cœur. Celuy qui a le cœur n’a pas beſoin de révélation ou de confiance ; tout luy eſt ouvert.

27. — L’on ne voit dans l’amitié que les défauts qui peuvent nuire à