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croisade contre les albigeois.

ne s’est défendu ; et les Français leur courent sus et les ont tous taillés en pièces, et les ont combattus de telle sorte [3075] que celui qui échappe vivant se tient pour miraculeusement sauvé. Le carnage dura jusqu’au Rivel. Et les hommes de Toulouse qui étaient restés au camp se tenaient tous ensemble terriblement éperdus[1]. Dalmatz de Creixell[2] s’est jeté à l’eau [3080] en criant : « Dieu nous aide ! grand mal nous est advenu, car le bon roi d’Aragon est vaincu et mort. Jamais si grande perte n’avait été éprouvée ! » Alors il sortit de la Garonne, [3085] et le peuple de Toulouse, le

    chevaliers de trop ; si s’écria ... : « Ce n’est il mie ! » Quant li rois d’Arragone, qui estoit assez près du chevalier, oï ces paroles, il feri des esperons, et ne se volt plus celer, ains hucha à haute voix : « Voirement, ce n’est-il mie, mais veés le ci ! » Et c’est alors qu’il fut tué en combattant.

  1. La chronique de Jacme ne s’occupe pas des Toulousains ; mais P. de V.-C. dit positivement qu’ils ne furent attaqués qu’après la déroute des Aragonais. Pendant la bataille, dont ils ignoraient entièrement les péripéties, l’évêque de Toulouse les engagea à déposer les armes, afin d’échapper à un désastre imminent, mais ils méprisèrent ses avis, et furent à leur tour taillés en pièces.
  2. D’Enteisehl, dans le texte, mais il y a là une faute de copiste, car ce personnage ne peut être différent du catalan Dalmatz (en catalan Dalmau) de Creiseilh ou Creissil, qui figurera plus loin (v. 6735, 6789 et 7134), entre les défenseurs de Toulouse. C’est le même encore, selon toute apparence, qui est désigné par le seul nom de Dalmatz aux vers 6658, 7491, 8294. Jacme mentionne « en Dalmau de Crexel » parmi ceux qui prirent la fuite à Muret (ch. IX). Dalmatz de Creixell est témoin à plusieurs actes importants : en 1208 (Marca hispanica, col. 1393) ; en 1209 (Publications de la Soc. archéol. de Montpellier, n° 17, p. 54). Le 18 avril 1214 il assista à la profession de foi catholique du comte de Comminges (Doat, LXXV, 44 v°), et à celle du comte de Foix (Doat, CLXIX, 182 d). — Creixell est un village situé près de la mer, dans la province de Tarragone, partido de Vendrell.