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croisade contre les albigeois.

Dieu n’a été par moi maltraité, ni dépouillé ni mis à mort ; que jamais la voie de telles gens n’a été envahie par mes hommes. Mais de ces brigands, faux traîtres et parjures qui portaient la croix pour ma perte, [3305] aucun n’a été pris par moi ni par les miens qu’il n’ait perdu les yeux, les pieds, les poings, les doigts. Et je me réjouis de ceux que j’ai mis à mort, comme je regrette ceux qui m’ont échappé. Quant à l’évêque, qui montre tant de véhémence, [3310] je vous dis qu’en sa personne Dieu et nous sommes trahis : qu’avec ses chansons mensongères[1], ses dits insinuants, qui sont la perte de tout homme qui les chante ou les récite, et avec ses satires[2] aiguisées et polies, avec nos dons, grâce auxquels il s’est maintenu en l’état de jongleur, [331 5] avec sa doctrine mauvaise, il s’est élevé si

    oltremare, là onde moite volte recano la palma ; chiamansi peregrini in quanto vanno alla casa di Galizia.... ; chiamansi romei in quanto vanno à Roma. »

  1. On sait que l’évêque Folquet de Marseille avait été troubadour et des plus célèbres.
  2. « Satires » est évidemment impropre, puisque c’est un mot antique ; mais je ne trouve pas d’équivalent moins mauvais pour reproverbis. Ce mot peut signifier (par ex. v. 5410) un dicton, une sentence, comme dans l’ex. cité par Raynouard, V, 505 a ; d’autres fois c’est un mot vif et mordant (6380, 8290), une répartie (5456) ; mais le voisinage de cansos et de motz (3311), qui désignent sûrement des compositions littéraires, donne à croire que reproverbis doit être entendu en un sens analogue. C’étaient probablement des sirventes. Proverbium se trouve au même sens en latin. Dans la chronique du Bec une pièce française de 16 vers est précédée de ces mots : « Unde illud proverbium gallice » (Bouquet, XXIII, 456 e). — On ne possède de Folquet que des chansons amoureuses, antérieures, sans doute, à son entrée en religion, et une ou deux poésies pieuses.