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croisade contre les albigeois.

CLXVIII.

Pour prendre conseil le comte s’est tiré à part, et, prenant la parole, il expose la situation, soupire et gémit : [4730] « Seigneurs, avec vous tous, en raison de l’affection et de la déférence que je vous porte, je veux délibérer de ce que nous ferons désormais, si nous lèverons le siége ou si nous y resterons plus longtemps. Si nous nous retirons présentement, c’est la honte et le blâme ; si nous restons, c’est doubler la honte et le dommage. [4735] Car, telle est mon opinion, je crains que jamais nous ne recouvrions par force le donjon, et que nous perdions les hommes, les armes et les chevaux. Les perdre sans combat me navre le cœur. Pourtant, des deux maux je désire que nous choisissions le moindre. » [4740] Les barons l’écoutent tous, et se poussent l’un l’autre. « Seigneurs, » dit Foucaut, « entendez ce que je vais dire. Quitter le siége, ce serait vraiment faillir ; y rester c’est nous exposer à un tel désastre que votre réputation et la nôtre en seront abaissées à tout jamais. [4745] Si vous voulez m’en croire, je vous dirai ce que nous ferons. Nous resterons tranquillement et en paix, nous abstenant de toute hostilité à l’égard de la ville et de ses défenseurs ; et s’ils viennent nous attaquer, nous nous défendrons. Au bout de peu de temps nous fixerons un jour. [4750] Par la vierge Marie mère, nous sommes déshonorés, si, leur offrant la bataille, nous n’entrons pas avec eux [dans la ville] ! Nous choisirons cent de nos meilleurs chevaliers, guerriers accomplis, et les placerons en embuscade derrière la