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croisade contre les albigeois.

Le comte de Montfort convoque le Toulousain et le Carcassais [4975] et beaucoup de pays, et les gens du Razès, que personne ne reste en arrière, ni sergent ni paysan : que tous viennent à Toulouse, et ceux aussi du Lauragais. Et le comte, avec sa compagnie, chevauche si vite que des cinq journées il n’en a fait que trois[1]. [4980] Il se loge à Montgiscard et par le pays environnant. À l’aube du jour, quand brille le ciel serein, le comte de Montfort et les autres Français s’arment. Ils chevauchent aussitôt en bataille tout droit vers Toulouse par les beaux chemins unis. [4985] De la ville sortent, par deux ou par trois, des meilleurs chevaliers et des plus riches bourgeois. Là où ils virent le comte, ils lui adressèrent la parole, lui disant avec douceur : « Sire comte, avec votre permission, nous nous étonnons [4990] de vous voir venir avec glaive et fer mortel : on ne gagne rien à faire tort à son propre bien. Et s’il nous arrivait malheur par votre fait, nous aurions bien mal réussi, car entre vous et nous il ne devrait rien se produire qui fût une cause de mal, de dommage, de peine. [4995] Vous aviez bien voulu nous octroyer et promettre que de votre part jamais mal ne nous arriverait ; mais actuellement il ne nous paraît pas et il ne se peut pas que ce soit pour aucun bien que vous ayez

  1. Cinq journées pour le trajet de Beaucaire à Toulouse supposent des étapes distantes d’au moins 55 kil., ce qui est énorme pour une armée même peu nombreuse. Trois journées mettent les étapes à plus de 90 kil., ce qui ne peut être admis que pour un très-petit nombre de cavaliers avec relais. Cette interprétation est confirmée par P. de V.-C. : « Recedens nobilis comes cum suis ab obsidione Bellicadri, venit Nemausum, ibique dimittens equites ..... ipse properavit Tolosam » (Bouq. 107 b).