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croisade contre les albigeois.

suivit bien, mais il sut fuir mieux encore. [5815] À ce moment, voici le comte [de Toulouse] galopant, les rênes lâchées[1], et voyant ses adversaires morts, il en eut grande joie. Bernart de Comminges, homme plein de sens, dit : « Sire, il me semble que Dieu sera avec nous, puisque déjà, au passage de la rivière[2], nous les avons déconfits. [5820] Nous recouvrerons Toulouse, en voilà l’heureux présage ! — Beau neveu, » dit le comte, « nous ne serons pas trompés dans notre attente[3]. »

Tout le jour ils chevauchèrent par les chemins unis jusqu’à la tombée de la nuit ; alors le comte choisit ses bons et fidèles messagers, et leur donna brièvement l’ordre [5825] d’aller à Toulouse dire à ses amis jurés qu’il est arrivé là dehors de la ville avec les bannis, et qu’il les prie de venir le recevoir, sans y manquer. Mais à l’aube, quand le jour brilla, le comte, à la vue du jour, fut effrayé, [5830] craignant d’être aperçu, et que par toute la terre se répandit le bruit et la rumeur. Mais Dieu fit pour lui un miracle : le temps s’obscurcit et le brouillard vint assombrir l’air, permettant au comte de se retirer dans les bois où il fut bientôt caché. [5835] Le premier de tous Ugo Joan[4] sortit de la ville, avec Raimon Bernier qui était bien capable de remplir un message. Ils trouvèrent le comte tout seul, et quand ils se montrèrent, ce fut

  1. Traduction très-hasardée de esbailitz.
  2. La Garonne, ou l’Aussonnelle ? cette dernière est la petite rivière qui passe à la Salvetat, cant. de Leguevin.
  3. Il n’est rien dit de ce combat dans P. de V.-C.
  4. « Hugo Johannis » est capitoul de Toulouse en 1203 (Du Mège, Hist. des inst. de Toul. I, 282), et viguier de Toulouse en 1224 (Teulet, Layettes du Trésor, n° 1660).