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introduction, § vii.

tauban. Et puisqu’il y était resté onze années entières, il avait dû y venir vers 1198.

Nous avons raisonné jusqu’à présent en acceptant comme assurée la date de 1210 fournie par le vers 205. Cette date n’est pourtant pas à l’abri de toute contestation ; on pourrait soutenir que le ms. est fautif à cet endroit et proposer 1212. Et il y aurait des arguments à invoquer à l’appui de cette thèse. En effet, aux vers 116 à 120, l’auteur fait allusion à la bataille de las Navas de Tolosa, gagnée par les chrétiens contre les Sarrazins le 16 juillet 1212, et un peu plus loin, v. 137, est mentionnée l’élection du légat Arnaut Amalric au siège archiépiscopal de Narbonne. Or, c’est le 12 mars 1212 qu’Arnaut Amalric fut élevé à ce siège. Voilà donc, tout au commencement du poème, deux passages écrits nécessairement en 1212, et il peut paraître surprenant qu’un peu plus loin, au v. 205, l’auteur annonce s’être mis à l’œuvre en 1210. Il est évident que la difficulté disparaîtrait si on corrigeait 1210 en 1212. Mais on peut, je crois, tout concilier sans faire violence au texte. Il suffit de supposer que Guillem, ayant commencé son poème en 1210, a postérieurement ajouté les deux mentions relatives à l’année 1212. L’hypothèse d’une intercalation faite après coup n’est pas plus difficile à admettre pour ces deux allusions que pour le prologue tel que nous l’offre le fragment de Raynouard : pour ce prologue, l’hypothèse d’une addition postérieure est nécessaire, car, d’après le v. 207, le poème ayant commencé à Montauban, il faut de toute nécessité que le prologue où on nous montre l’auteur quittant Montauban pour Bruniquel ait été ajouté après coup.

Revenons maintenant sur quelques-uns des faits mentionnés plus haut. Nous avons vu que notre auteur fut pourvu par le comte Baudouin d’un canonicat à Saint-An-